Au fond du ravin

Oleg Boulhanev


Je suis né dans un ravin
j’étais mort
à deux doigts près
un boyau
allaient-ils venir ?
ne me laissez pas ici !
mon corps est une plaie
une pierre brisée
je ne peux plus bouger
à peine respirer
où restez-vous ?
pourquoi ne venez-vous pas
m’arracher à cette gorge ?

La gloire me tendait les bras
je le sais
elle m’a précipité vers la mort
la mienne
à deux doigts près
un boyau

Des voix se sont dessinées
elles m’ont soulevé
m’ont sauvé
remis en selle

remis en cause
bah
finalement
l’aigle n’était qu’un merle
la promesse un mirage
dommage

Je suis né dans un ravin
j’ai vu ma fin
j’ai dressé les poings
dressé une âme
de guerrier
ne m’enterre pas si vite
ne m’enterrez pas si vite
je reviendrai
les forces décuplées
plus tôt
que vous n’osez l’imaginer
vous êtes si pressés
pourtant
je vaincrai
les légendes révérées
les plus hautes cimes
les aiguilles les plus raides
où l’air se fait rare
où le froid mord
où la chair se consume
je m'élèverai
je m'envolerai
je pleurerai
et vous pleurerez
et vous chanterez mes louanges
et vous chanterez mon nom
Remco


© Éditions de L’ARBàLETTRES, 2022

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